Histoire et patrimoine
Saint Vigor et son passé maritime…
En des temps reculés mais pas si lointains, la commune de Saint Vigor d’Ymonville pouvait se targuer d’un port de pêche nommé Porquieval ou Port Nerval. Ce petit port situé dans un méandre de la Seine avait pour fonction principale « l’échouage ou la posée » compte tenu de son banc de sable fixe et naturel. Les courants changeants et capricieux déplaçant les bancs de sable ainsi que les effets de la marée obligeaient alors les convois à marquer une étape d’attente avant de pouvoir continuer leur cheminement vers l’aval ou l’amont de la Seine.
L’autre fonction étant axée sur la pêche locale et le déchargement de marchandises utilisées à proximité (essentiellement la pierre de Caen pour les constructions). Cette pêche est représentée sous la forme d’une lithographie référencée LB184 595 au musée André Malraux du Havre. Celle-ci immortalisant la pêche d’une baleine dans l’estuaire de la Seine par des pêcheurs Saint Vigorais le 6 octobre 1847. Le squelette fût exposé au musée d’histoire naturelle à Paris pendant une longue période.
Des salines étaient aussi présentes tout au long des falaises. Celles-ci sont visibles sur les cartes de Cassini. Le Sel ainsi récolté était propriété des moines et servait à payer l’impôt de l’état.
Alors que d’énormes quantités de céréales et autres denrées remontaient la Seine en direction des greniers de Paris, fort était la convoitise des populations riveraines envers ces denrées et plus particulièrement en ces temps de disette. Il était alors recommandé aux maîtres des vaisseaux en attente sur les posées de Saint Jacques, de Quillebeuf et de Caudebec d’observer la plus grande vigilance face à d’éventuel pillage.
Ce petit port dépendait administrativement des moines résidant au prieuré de Saint Jacques du Val Hulin, eux même sous le patronage de l’abbaye de Valmont, et ce dès 1269.
En 1800, les chapelles de Saint Jacques et de Saint Philippe du Val Hulin furent transformées en poste de douaniers afin d’endiguer la contrebande de grains et récupérer la taxe des denrées à destination de l’Angleterre. Ce poste de douane avait aussi la responsabilité du bac présent en ces lieux et permettant la traversée de la Seine. De Saint Vigor (rive Nord) à Fatouville-Grestrain (rive Sud)
Avant la mise en service du canal de Tancarville et l’assèchement des marais, le lit de la Seine louvoyait au plus près de nos falaises calcaires. De nombreuses marques encore présentes jalonnent cet espace, notamment dans les habitations riveraines. Tout un pan de l’histoire Saint Vigoraise se verra développé au fil de ce document.
Le prieuré de Saint Jacques du Val Hulin…
Il semblerait que cette appellation émane d’un des chemins de transhumance vers Saint Jacques de Compostelle, soit une des nombreuses routes convergentes vers le chemin de pèlerinage, partant de Fécamp et à destination de Chartres. Les pèlerins empruntant le bac de Saint Vigor pour traverser la Seine et gagner la rive Sud.
De nombreux chemins d’accès reliaient le village situé sur « le plateau » aux zones humides du marais. Ils permettaient aussi aux enfants de venir à l’école, aux habitants d’accéder aux zones de pêches et aux bétails de migrer des fermes aux pâtures (ou prés salés). La majorité des embarcations se trouvaient au pied de la Valleuse de l’Estrangle.
En 1875, les plaines alluvionnaires de bords de falaise furent drainées grâce aux deniers de l’Etat. De multiples carrières à flan de falaise furent créées et mises à contribution pour réaliser l’endiguement de canal dit « canal de Tancarville ».
La réalisation de ce nouveau canal de liaison vers la Seine généra un nouveau bac, de Saint Vigor d’Ymonville à Berville sur Seine mais aussi la fin programmée du petit port Nerval ainsi que de ses pêcheurs locaux. Le XXème siècle vit la disparition du dernier pêcheur et des zones humides au profit des industries.
Un peu d’histoire….
Afin d’utiliser le bac de Saint Jacques du Val Hulin à Grestain les désirant devaient s’acquitter d’une taxe reversée au Conte de Tancarville…un droit de nef au bac d’une rive à l’autre de la Seine pour porter ou rapporter des personnes, du bétails ou des marchandises.
Voici ce qui nous est resté du « Coutumier d’Harfleur » …en vieux Normand
« L’homme ou la femme traversant Seine doit de coutume, s’il n’est franc, deux sous.
Et partant, l’homme acquitte son cheval.
L’homme ou la femme qui n’a qu’un œil ne doit qu’un sou.
L’homme et la femme qui ne voient ne doit rien.
Le jongleur doit jouer de son métier et partant quicte sans autre coustume paier.
Le gentil chien doit, en traversant Seine, obole.
Et partant son maistre quicte.
Le mâtin ne doit rien.
Le porc ou truye, grand ou petit, obole.
Et par ce, son maistre quicte.
La beste à laine, grande ou petite, chacune obole.
Et partant, son maistere quicte.
Item, si un juif passe le travers de Seineil doit quatre deniers et une juive quatre deniers et si elle est prains (enceinte) elle doit huit deniers… »
Le commerce de la pierre de Caen
Dès 1066, la renommée de la pierre de Caen devient internationale. Le transport fluvial étant moins onéreux que son homologue terrestre pour les fortes charges. De multiples petits appontements jalonnaient les rives de la Seine et offraient une accessibilité en eau profonde…quid du port de Saint Vigor et de Tancarville.
C’est pour cette raison que l’essentiel de l’utilisation de ce matériau n’est que localisé aux abords immédiats des zones fluvial.
Le commerce du Sel
Jusqu’au XIXème siècle, la Normandie fût une région productrice de Sel…un pays de salines.
Ainsi toutes les localités de la basse Seine disposaient de salines : Oudalle, Sandouville, La Cerlangue, Tancarville et Saint Vigor.
Des vestiges préhistoriques semblent montrer les prémisses de cette production ; le sel étant produit par ébullition et non par évaporation, des briquetages (fours rudimentaires), godets et augets semblent corroborer ces faits.
Au XIIème siècle, les salines connaissent une expansion sur les plages du pied de falaise. Utilisé essentiellement pour le salage des aliments (conservation) mais aussi pour la réalisation d’échange commerciaux, ce sel connu à partir du XIVème siècle un déclin cuisant. L’Etat se mit à taxer fiscalement cette ressource naturelle, La gabelle, sous l’hôtel d’une denrée de première nécessité devant être contrôlée. Ainsi ce Sel se voit stocker dans les greniers de l’Etat deux ans pour séchage.
La production et le transport est laissé à des entreprises privées, la vente aux particuliers est contrôlée par les agents de l’Etat en poste aux greniers à sel : mesureurs, contrôleurs, grenetiers, greffiers, huissiers, procureurs, avocats et présidents.
Pour exemple 19 agents d’Etat étaient présents au grenier à sel de Caudebec en caux pour 159 paroisses desservies en 1665.
Lorsque l’Etat fait main basse sur un produit de première nécessité utile à la vie du peuple pour des raisons cupides, la contrebande prend naissance. De plus seront créées des « fermes du roi » chargées de contrôler les gabellants. Des agents procédaient à des visites domiciliaires afin de vérifier de la non-présence de « faux sel ». C’est à dire de sel de contrebande.
Qu’est-ce que « Le faux sel »
Depuis l’ordonnance de Colbert en 1680, le sel ne pouvait provenir que de Charente Maritime ou du Pays Nantais…tout autre sel étant déclaré « faux sel ».
Le 5 janvier 1712, le contrôleur général envoyait une missive au ministre de la guerre « il y aura bientôt plus de faux sel dans les provinces du royaume qu’il n’en faut pour la consommation de tous les habitants, comment faire autrement ? ».
L’Etat mobilisa l’église pour endiguer la contrebande et d’éminents théologiens mirent au point l’arsenal répressif et idéologique afin de mettre fin à celle-ci.
A la Révolution de 1789, la gabelle, les greniers à sel et les fermes générales sont supprimés. Le commerce du sel des salines fût profondément transformé par l’émergence de l’exploitation du sel de carrière d’Alsace dit « sel gemme ». Les contrebandiers et les faux sauniers perdirent leurs gagne-pains et se transformèrent en partisans.
Les Manoirs
Au Xème siècle, l’abbaye de Vœu reçut de nombreuses donations aumônées, par les tenants de fiefs, en particulier les Seigneurs du Catillon mais aussi par de plus modestes tenanciers relevant tous du comté et de la baronnie de Tancarville.
En 1228, après le décès de Gilbert de Casteillon, chevalier tenancier d’un fief s’étendant sur les communes de St Vincent de Crasmesnil (hameau du Catillon), de Sandouville et de St Vigor d’Ymonville. Le manoir était sur cette paroisse.
A partir du XV -ème siècle, les biens de st Vigor d’Ymonville sont comptabilisés dans le cueilloir avec ceux du fief de la Haule, difficilement dissociable. Les moines du Valasse avaient acquis un important fief noble s’étendant sur st Vincent et st Vigor : fief de la Haule à la fin du XVII -ème siècle.
Fief : Domaine concédé à titre de tenure par le seigneur à son vassal, à charge de certains services.
Aujourd’hui propriété privée, ce manoir fût construit au XVIIème siècle au hameau de bacqueville, soit en 1627. Faisant partie du fief de St Vigor, cette propriété revêtait un toit de chaume jusqu’en 1970 puis reçu une couverture d’ardoises. Restauré avec passion et dans les règles imposées par le patrimoine, celui-ci offre à la vue des passants pigeâtres (équivalent aux corbeaux des édifices en pierre) et encorbellements.
En effet, ces encorbellements avaient pour fonction officielle la protection physique des personnes et des murs présents en partie inferieure mais avaient aussi une fonction d’intérêt fiscal. L’impôt foncier étant calculé sur la surface au sol du bâtiment, celui-ci offrait une extension de surface à « moindre frais » et valide selon la loi. D’ailleurs de nombreuses constructions de cette époque renvoyaient les mêmes effets de construction. Pour bon exemple, la rue de 104 à Harfleur ou les petites rues du vieux Honfleur.
Cet encorbellement repose sur un solin de calcaire et silex. On peut y observer sur le pignon Est une voute ou cintre murée…vestige d’une ancienne ouverture.
L’autre manoir, situé côté opposé de la rue, à subit par son propriétaire une restauration d’équivalente facture à celle du manoir détaillé plus en avant.
Les standards de construction de deux 2 manoirs sont appliqués à l’identique, rez-de-chaussée en pierre calcaire et silex, étage à colombage et entre colombage composé de torchis, toiture à longs pans et cheminée massive en briques de st Jean et silex.
Les fermes du XVIIème siècle :
Souvent mentionnée dans cet ouvrage et notamment lors des activités de fête foraine, la ferme de Mr Lefrancois Hubert se dresse à l’entrée du village côté Nord.
Ferme familiale depuis plusieurs générations, ce bâtiment subit de multiples modifications au fur et à mesure du temps. La modification la plus visible fût celle réalisée sur sa façade. En effet, il peut être observé que l’ensemble du bâtiment était réalisé en colombage et torchis. Comparativement à la photographie actuelle, nous pouvons y observer un rez-de-chaussée en briques et pierres calcaire.
Ayant discuté avec le propriétaire, la raison expliquée de cette modification fût en relation avec le paraitre de l’époque.
Au début du XIXème siècle, bon nombre de fermes subirent ce même changement architectural. Posséder une ferme dont la façade était constituée de pierres revêtait un ordre de richesse, de position sociale avancée.
D’autres fermes furent complètement détruites puis reconstruites entièrement en briques et silex…ainsi bon nombre de « maison de maître » fleurissent en de nombreux lieu du bocage Normand.
Le bâtiment disparu
Les chapelles de Saint Jacques du Val Hulin et de Saint Philippes, dépendantes de l’abbaye de Valmont depuis 1269, furent transformées vers 1800 en poste de douane. Délaissées, elles furent signalées en ruines en 1968. Lieu de jeux pour les enfants du village, ce bâtiment s’effondra sur lui-même.
De nombreux bâtiments datant du début du XVII restent encore présent sur notre commune. Levez les yeux, observez les parties hautes des vieilles bâtisses et vous trouverez peut-être une date, la date de la création.
Ne pouvant traiter individuellement chaque bâtiment dans ce document, une étude approfondie de ces lieux verra peut-être le jour….tant de chose reste à faire.
L’église
L’église
De type romane, notre église fût édifiée durant la seconde moitié du XIème siècle selon des règles très précises. En ces temps reculés les hommes cherchaient à favoriser la relation entre la terre - le vivant, et les éléments cosmiques – le ciel.
Ces édifices se voyaient construits en des lieux précis et chargés en énergie. Pour certaines se fût à l’emplacement d’une pierre sacrificielle rappelant à la vie extracorporelle, pour d’autre au-dessus ou à proximité d’une source d’eau…d’un point de vue biblique l’eau représente l’essence de toute vie. D’autre évoque la réalisation de ces édifices sur les lignes de force de la nature que les anciens appelaient « les Lignes Leys » ou « ligne du monde ». Les lignes les plus connues et reconnues sont celles dites de « Hartmann ».
Depuis son édification, notre église n’eue de cesse de se modifier, de s’agrandir ou de se moderniser. Cette épopée sera mise à votre connaissance au fur et à mesure de l’avancée de ce chapitre en restant le plus simple et concis possible.
Quelques repaires de construction :
Les bâtisseurs de ces époques ont intégré les tracés fondamentaux géométriques symbolisant le cheminement du profane au sacré tels « le rectangle, le carré et le cercle ».
La porte d’entrée Ouest, première table rectangulaire symbolisant la matière brute de l’univers dont l’homme est issu…le croire. Se dirigeant vers le cœur, la table carrée symbolise la conscience…le savoir. Puis abordant le chœur, le cercle symbolise l’esprit…le connaitre.
La construction d’un tel édifice était réalisée par les bâtisseurs selon un orientation Est-Ouest augmenté d’un angle de 11° vers le Sud afin que celle-ci soit alimentée en énergie solaire tout au long de l’année…soit selon l’angle de précession opérant sur notre planète.
Le chœur est percé de 2 verrières symétriques afin de recevoir le lever du soleil au solstice d’hivers par la verrière de droite et celui du solstice d’été par celle de gauche.
La façade Nord dotée d’une baie occultée matérialise l’obscurité en opposition à la façade Sud laissant entrer la lumière (antagonisme ténèbres / lumière).
Un angle de 33° est formé entre ces 2 verrières. Pour les chrétiens ce nombre se rapporte aux 33 années terrestres du Christ. Ce dernier étant un des nombreux symboles cachés aux yeux des profanes. Ces divers signes ésotériques étaient la marque des francs-maçons appliqués lors de leur création.
Afin de donner des proportions harmonieuses à l’édifice, les bâtisseurs l’ont marqué de la « divine proportion » ou du non moins célèbre « nombre d’or » cher à Léonard de Vinci entre autres…soit 1.618.
Ce nombre, multiplicateur, proposait à la vue la fluidité des lignes et des volumes de l’édifice réalisé.
(Ouvrages utilisés : Le langage symbolique et les églises / Chartres-cathédrale alchimique et maçonnique de Patrick Burensteinas).
Le portail d’entrée présent sur la façade Ouest, complété de 2 colonnes monocylindriques à chapiteaux floraux. Elles sont les dignes représentantes de cet art du XIIème siècle. Surmontée et en forme de demi-cercle, ce portail arbore une décoration sculptée qui embellit et valorise celui-ci.
Le clocher dit « en bâtière » est un toit à 2 pans versants opposés très inclinés. Il est complété de 2 pignons maçonnés. Généralement implanté historiquement en Basse-Normandie (325 communes), ce type architectural est presque totalement absent en Haute-Normandie.
Agrémenté d’un beffroi composé d’un entrelacs complexe de pièces de chêne, celui-ci se voit isolé mécaniquement des pignons maçonnés. Ainsi les mouvements générés par le balancement des cloches n’affectent pas l’intégrité de la structure maçonnée du bâtiment. Le beffroi se mu alors librement. Munit de 3 emplacements à cloches, notre beffroi n’en compte plus qu’une…ANNE…située à l’extrémité Est. « ANNE » fût déplacée et recentrée dans cette structure en 2017 lors des travaux de réfection réalisé par la commune et les architectes des bâtiments de France (Mme Petit).
« ANNE », par ces 4 anses, est solidaire d’un mouton d’acier ou joug. Les 4 anses permettant la réalisation d’un quart de tour de la cloche, déplaçant l’usure provoquée par le battant lors du choc de celui-ci sur la lèvre inférieure.
« ANNE » est incrustée de multiples écrits qui se présentent en sa partie supérieure. Ces écrits ont été minutieusement photographiés et transcrits par Mme MONVILLE Christine. Merci à elle pour son autorisation de publication de son travail.
L’église de ce style-là plus connue et présente dans tous les documents d’histoire est celle de Sainte-Mère-Eglise dans la manche.
Un peu d’histoire
Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, la nuit précédant le débarquement des forces alliés en Normandie, John-Marvin STEELE (1912-1969) parachutiste embarqué à bord d’un C-47 fût largué à haute altitude afin de ne pas être pris dans le feu de la DCA. Il se retrouva croché au clocher de l’église de Sainte-Mère-Eglise à cause des vents et d’un matériel peu manœuvrable. Cette opération avait pour objectif de créer une tête de pont aéroportée à l’arrière d’Utah Beach et de faciliter ainsi le débarquement à l’aube (opération Albany et Boston).
Le terme « en bâtière » est dérivé de l’expression « en forme de bât » soit le bât de l’âne. Le bât est un dispositif en bois permettant le transport de charges lourdes par des équidés tel l’âne.
La construction
Essentiellement construite en pierre calcaire tirée du sous-sol et des carrières locales, elle fût réalisée puis reconstruite suite à divers aléas. Ces fondamentaux sont datés du XI ème siècle. Elle fût modifiée, arrangée ou reconstruite au XII ème, au XV ème ou elle acquit le style gothique, au XVI ème et enfin au XIX ème siècle. Le chœur et l’abside sont les parties les plus anciennes tandis que les deux collatéraux (ou déambulatoires) ainsi que la nef sont les derniers à avoir été refaits.
Au XV -ème siècle et plus précisément entre 1440 et 1441 lors de la guerre de cent ans, les Anglais d’Edouard III Plantagenet détruisirent la Nef. Inutilisable, les offices furent dispensés temporairement dans la grande grotte de saint Vigor ou « fort des carrières » et ce jusqu’à ce que celle-ci soit reconstruite début XVI -ème siècle. Elle fût reconstruite selon le « style flamboyant » facilement reconnaissable à ses arcades ogivales.
Il est fort probable que se fût lors de la reconstruction entre 1875 et 1884 que la nef et les collatéraux s’étoffèrent. La preuve qu’il nous en reste est la présence des larmiers des 2 anciennes toitures découvert lors des travaux de réfection de la toiture en 2019.
Quelques dates concernant la réfection ou l’entretien de l’édifice :
En 1713, la Nef nécessita de gros travaux de réfection suite à l’affaissement de la voûte coté droite. La charpente se vit alors renforcée, le clocher réparé et une partie de la couverture refaite.
En 1867, l’architecte Venambre se voit missionné pour la restauration des chapelles latérales alors en ruine. Utilisant des matériaux d’extraction locale, les réparations adjoignirent par la même occasion de la pierre de Tuf aisément reconnaissable à sa couleur allant du gris au jaune et par sa structure vacuolaire.
Entre 1875 et 1884 une restauration de la Nef et de ses bas-côtés aura lieu ainsi qu’une surélévation des murs, voûte et charpente.
En 1933 un arrêté inscrit l’église de Saint Vigor d’Ymonville au titre des bâtiments historiques.
En 1964 l’église fût fermée après constatation de la dégradation des 2 gros piliers du transept soutenant la voûte. Une fissure ainsi que de multiples lézardes étaient visibles sur toute leur hauteur ainsi que sur le mur du clocher.
Entre 1964 et 1971 de multiples épisodes de restaurations diverses eurent lieu notamment vis-à-vis de la charpente, de la couverture ainsi que des maçonneries extérieures.
En 1978 la sonnerie du clocher se voit modernisée et équipée d’un dispositif électrique de mise en action automatique de la cloche…07h00…12h00…19h00.
En 1980 certains vitraux sont remplacés à l’identique et toutes les verrières se voient complétées d’un treillis de protection afin de prévenir à des dégradations éventuelles. Ceux-ci sont financés par diverses dons des habitants ainsi que par la commune.
Toujours pendant des travaux de restauration, des ouvriers mirent au jour la reproduction du vaisseau « l’impératrice », cassée, dans une caisse en bois sous le retable. Cette reproduction d’un ex-voto, trônait suspendu dans le transept. Le Maire en exercice, Mr Lemaître Gilbert et le conseil municipal en place, prirent la décision de refaire naître de ses cendres cet emblème qui fût jadis présent dans notre église. Le passé maritime de pêche se voyant ainsi ressuscité.
Conservé en l’état jusqu’en 1989, cette réplique subira une restauration complète par des habitants du village…Mr Bidoit pour la structure de la coque, les mâts et les cordages…Mme Savalle pour la voilerie entre autres…et Mr Legrand pour la peinture.
Ce grément est de nos jours visible dans la salle du conseil municipal et protégé par une étreinte de verre. (Maquette « l’impératrice » de 1850)
Un peu d’histoire Un « ex-voto » est une offrande faite à un dieu en demande d’une grâce. La locution latine « ex-voto » signifiant « d’après le vœu ». Dans de nombreuses régions ou pays à façade maritime et à communauté de marins, on rencontre souvent des ex-voto à caractère maritime dans les lieux de culte sous forme de modèle réduit d’esquif. Le navire votif fût offert par la communauté des marins, très présente sur la commune. En effet Saint vigor disposait dans son histoire d’un port de pêche au XVII ème et XVIII ème siècle….port Nerval ou Porqueval. |
En 1991 la croix de fer et la girouette « ou le coq » situés au sommet du clocher se voient restaurés. Un paratonnerre y fût adjoint par la même occasion.
En 1996 des travaux de restauration complète de la sacristie sont effectués.
En 2000 le chœur est refait entièrement par une entreprise locale…l’entreprise Feuillolay.
En 2003 l’église se pare d’une illumination extérieure mettant cet édifice en valeur sous les projecteurs disposés en son pourtour.
En 2015 l’abside fût à son tour restaurée et la première phase de réalisation des allées du cimetière commence. L’entrée d’un soupiraille ayant été obturée par mesure de sécurité.
En 2017 le beffroi fût restauré et la cloche recentrée. La seconde phase de réalisation des allées du cimetière s’effectue et conclue.
En 2018 dernière phase de réalisation des allées du cimetière avec l’entrée côté parking école maternelle.
En 2019 la toiture de la nef refait peau neuve ainsi que le remplacement de nombreuses poutres de bois constituant la charpente. A noter le désistement de l’état concernant les aides fiscales attribuées à la réfection du patrimoine…la mairie recouvrera seule les factures.
Petite anecdote concernant « le fond baptismaux »
Il est de forme octogonale, soit à 8 cotés. Dans la tradition chrétienne le 8 symbolise l’achèvement et donc la création. C’est aussi le symbole de la résurrection du Seigneur le lendemain du 7ème jour.
En architecture l’octogone permet de passer du carré ou cercle…rappel de construction ésotérique appliquée par les francs-maçons.
Les 4 piliers du transept, dont 2 sont engagés, soutiennent les arcades ogivales à double rouleaux. Des chapiteaux présentent quelques originalités. L’un est constellé de trous fins semblant avoir été réalisé au trépan tandis qu’un autre renvoi la vision d’une corbeille entièrement recouverte d’un damier…un rappel de l’appartenance d’antan au diocèse de Bayeux et ses grands travaux.
Trois animaux sont grossièrement taillés sur un autre rappelant le lien « terre/ciel ».
L’oculus, situé au centre de la voûte du transept, servait à l’origine à monter ou à descendre les cloches vers ou depuis la chambre des cloches du clocher. De plus il permettait le passage de la corde servant à actionner le balancier mécanique de la cloche. Ainsi l’ecclésiastique actionnait, par un mouvement vertical et répété, la corde descendante du ciel du transept et animait l’ensemble des cloches.
Le mécanisme manuel fût remplacé par son homologue électrique et l’oculus fût obturé. Actuellement visible, on peut admirer sa réfection et son obturation fait de bois de chêne.
L’oculus vue de l’intérieur du chœur, puis vue du dessus depuis l’accès au beffroi.
Un peu d’histoire
A l’époque ou la vie était rythmée par les évents de la nature, la cloche d’un village était le seul instrument de communication de masse du fait de la portée de « sa voix ».
Les romains l’utilisaient pour annoncer l’ouverture ou la fermeture des marchés. Certains disent que les villages et leur église étaient implantés « à portée de cloche » afin que les messages circulent…les messages d’alerte, de repaire temporel, d’appel civil ou religieux, de localisation etc...
Abraham Moles introduisit le codage-décodage sémantique pour comprendre le langage dispensé par le tintement des cloches. C’est au XVIIIème siècle que ce codage fût simplifié. Au temps où les clepsydres et les cadrans solaires régnaient en maitre, et ou l’illettrisme était courant, les sonneries de clocher devinrent les diapasons des vies de chacun…l’aurore, le midi, le couvre-feu pour rythmer le travail. L’Angélus (ou l’heure de prier Marie) à 12h00, les vêpres à 18h00 rythmaient entre autres les moments de prière.
D’autre sonneries de circonstances virent le jour…le tocsin, qui servait à alerter d’un danger…le glas, qui annonçait le décès.
(Ouvrage utilisé : Code et langage des sonneries de cloches en occident. Éric SUTTER)
Description de l’extérieur de l’église
Ce monument recèle bon nombre de curiosités historiques, visibles de tous mais à qui sait les voir. Ce descriptif est en aucun cas exhaustif. Celui-ci n’a que pour effet de réveiller la poursuite de la curiosité tout en proposant une étude avertie.
Pour ce faire nous allons effectuer ce descriptif en commençant par la façade Ouest et son portail d’entrée puis, corrélativement au sens de déplacement des aiguilles d’une montre nous tournerons autour de celui-ci.
Tout autour de notre église se dressent des contreforts appliqués sur chacune des façades. L’utilité de ces derniers vient du remplacement d’une ex-charpentes en bois par des ogives en pierres de tailles. L’augmentation des contraintes de poussées latérales de celles-ci sur l’ensemble de l’édifice requerra de la part des bâtisseurs de l’époque l’emploi de ces pièces architecturales afin de préserver l’intégrité de la structure alors modifiée…soit éviter l’effondrement.
La façade Ouest
Composée d’un portail d’entrée de type « architecture romane » aisément reconnaissable à ses arches supérieures convexe et son élévation modeste (la voûte en berceau et la croisée d’ogives valident ce style à l’intérieur).
Au-dessus du larmier il peut être observé 4 réalisations sculptées de forme ovoïde dont la plus haute présente une légère protubérance externe. Ces logements pouvaient, à une époque, accueillir de petites sculptures ou statuettes.
Deux ouvertures grillagées laissent entrer la lumière de l’astre vénéré…le soleil…en direction, pour celui de gauche, du collatéral gauche et pour celui situé au centre, l’accès au chœur.
On peut noter une implantation dissymétrique de cette dernière…erreur volontaire ou signification cachée ??aucune réponse n’en sort. De même, une ouverture murée ou pressentie s’offre à notre regard sur le coté gauche de l’entrée…réelle ouverture ou niche avortée ??
La question que l’on peut se poser est la raison pour laquelle cette façade ne bénéficie pas des mêmes standards de construction que le reste de l’édifice…c’est à dire la symétrie propre aux bâtisseurs des temps passés…une ouverture et une niche avortée à gauche mais pas à droite et une ouverture centrale excentrée. Symbolique cachée ou simple bévue ??
La façade Nord
A la croisée du pignon Ouest et Nord, en partie basse du contrefort, il peut être observé l’index de nivellement général (IGN) marquant l’altitude de notre village par rapport au niveau de la mer. En son centre, la plaquette altitudinale indique 119 mètres.
Cette donnée est validée par rapport au marégraphe de Marseille pour la France métropolitaine.
Sous le pan incliné recouvert d’ardoise, cette façade se compose de 5 ouvertures de type romane et de 5 contreforts surmontés de frises sculptées. Ces 5 verrières illuminent le collatéral gauche ainsi que les sculptures et tableaux présents dans l’église.
En prenant le temps d’observer la couleur et la texture des pierres composant cette façade il est aisé de voir quelles ne sont pas de la même époque de construction. On peut réellement dissocier les deux premiers rangs en partie basse des suivants. Sans prendre en compte les réparations matérialisées par des pierres plus jaunâtre, ces deux rangs renvoient à l’époque ou cette église fût surélevée et modifiée. De plus, et aux dires des experts des bâtiments de France, il serait bon de s’interroger sur la discontinuité de la ligne horizontale parcourant celle-ci. Est-ce dû à un agrandissement des verrières ?
L’aile Nord du transept
Coté Ouest il reste le vestige du larmier de l’ancienne toiture recouvrant le collatéral alors présent. On peut aussi y apercevoir les vestiges d’une ancienne arche rebouchée lors de la surélévation. L’inclinaison et la petitesse de cet élément nous laissent imaginer l’ancienne configuration de l’église comparativement à celle présente de nos jours.
Si l’on se réfère aux autres monuments religieux de ce type, ces derniers possédaient une entrée côté Nord. Les anciens bâtisseurs croyaient au déplacement des énergies de la pierre vers le corps du profane et vis versa. Pour y faire, à l’entrée Nord, à droite de la porte se situait « la pierre de décharge » cette pierre pouvait aussi se située au sol, mais toujours au Nord, de plus au centre du transept se situait la pierre d’équilibre.
Notre église ayant subit de forte transformation sur cette aile et au sol, aucune trace réelle ne semble apparaitre.
L’utilisation de différent type de pierres pour ce rebouchage est frappante…du silex noir, de la pierre de Tuf et de la pierre calcaire sont sans doute issues d’une carrière d’extraction locale ou de la grotte dite » fort des carrières ».
Gravés sur ses pierres, il est encore possible d’observer et malgré l’usure du temps, 2 graffitis. L’un représentant un esquif rappelant le passé maritime de notre commune et l’autre un semblant de croix ou de damier…mais là le temps à fait son œuvre.
Une petite verrière s’immisce dans cette grande façade laissant filtrer un léger rayon de lumière de milieu d’après-midi vers l’intérieur du transept car orientée vers le couchant.
Sur sa plus grande façade, celle exposée plein Nord, est présente une superposition de 2 verrières quasiment axées rapport à la pointe du faitage. De deux tailles différentes mais réalisées selon les règles de «la divine proportion », ces ouvertures parées de vitraux baignent la croisée du transept de la lumière lors des solstices d’été.
On peut aussi y voir dans ces vitraux les formes géométriques tel le cercle à l’intérieur du carré nous rappelant la symbolique désirée par les bâtisseurs.
On peut toujours constater la présence de 2 massifs contreforts aux angles de cette aile Nord, rappelant de fait les forces de poussées en actions sur ce bâtiment.
Sur la façade Est, une autre petite verrière permet l’entrée de rayon de lumière, notamment en matinée car orientée vers le levant. En levant les yeux, on peut aussi observer les modillons (corbeaux sculptés roman) qui terminent joliment la façade. On peut y voir, longeant la gouttière de la sacristie, l’ensemble du faisceau électrique nécessaire à l’église.
La sacristie
La sacristie, construite entre le XVIIIème et le XIXème siècle, faite de pierres de calcaire et de briques de Saint Jean est assise sur de forts moellons issus de carrières locales ou fort possible de la grotte dite « fort des carrières » et n’est pas sans rappeler les corps de ferme Normand.
La façade Est
L’abside composant le chœur de l’église, de type roman fait partie des fondamentaux de notre église. Datant du XIième siècle elle abrite l’autel, le retable et le tabernacle en bois.
Composée de 2 verrières à vitraux, l’un représentant St Pierre et l’autre St Paul, orientés de tel sorte que les rayons du soleil illuminent le centre de l’autel. Les bâtisseurs ayant voulu scrupuleusement respecter un angle de 33 degrés.
Ces 2 vitraux furent réalisés en 1880 par Jules Boulanger maître verrier à Rouen. D’autres ateliers verriers exerçaient à Rouen ; Devisme, Duhamel, Marette… (information Mr Lecuyer J.M.)
Renforcé par 4 contreforts et magnifié d’un encorbellement raffiné, rappelant par ce damier les grands travaux de Bayeux (diocèse alors propriétaire des lieux en l’époque), le chœur est complété par des modillons affichant diverses aspects…têtes d’animaux, gargouilles, etc…les gargouilles et autres représentations belliqueuses sont placées pour conjurer et éloigner les « mauvais esprits ».
Parfaitement alignées suivant l’axe Est / Ouest majoré de 11 degrés, l’abside, le clocher, les bras du transept et la nef donnent à l’église un plan bénédictin. C’est un plan de construction ambitieux pour une commune rurale. L’énigme persistante étant la raison de cette construction, identique à celle originelle de Saint Jean d’Abbetot, alors antérieur.
La façade Sud
La façade Sud du chœur laisse pénétrer la lumière par une seule et unique ouverture. Comme vu précédemment et avec le respect des croyances des bâtisseurs, opposant ombre et lumière, ce mur est flanqué d’une verrière de bonne facture composée de 2 vitraux juxtaposés.
On retrouve à la jonction de la toiture et du mur les modillons usés ainsi que la trace de multiples réparations.
La branche sud du transept laisse lui paraitre une ancienne voûte. Comparativement à celle repérée coté Nord, celle-ci offre une grande taille….prévision d’une autre abside ou d’une entrée avortée ??
Quelque fût la destination de ce vestige, il fût refermé par l’emploi de diverses matériaux locaux. De plus des graffitis sont visibles sur cet paroie…en partie haute sont présents des modillons arborant des têtes d’animaux et d’autres des têtes de diablotins.
Le bras Sud du transept est pourvu d’une verrière complèté de 2 fines lucarnes coté abside. La lumière du solstice d’hiver baignant la croisé de celui-ci.
Côté Ouest, est enchâssée une tourelle qui renferme un escalier de pierres taillées en colimaçon. Celui-ci donne accès aux charpentes, beffroi et clocher. Pourvu de lucarnes, il se complait merveilleusement dans l’ensemble architectural de l’église.la porte d’accès se trouve dans le collatéral droit proche du chœur
Enfin pour finir notre tour extérieur de l‘église, le mur sud du collatéral et ses 4 verrières, complétées par une porte donnant accès au cimetière. Cette porte est maintenue fermée par une grille en fer forgé et une non moins massive porte en chêne. Cette porte sert lors des célébrations funéraires pour le passage du défunt de l’office vers l’endroit de sépulture.
Les vitraux, non sans un but décoratif, furent utilisés à des fins éducatifs. Ils se substituaient aux ouvrages et prodiguaient les enseignements aux fidèles souvent analphabètes car limité en accès aux littératures, de surcroît écrites en latin. Ils étaient souvent réalisés suite à des dons, permettant ainsi à ces donateurs « d’acheter » le pardon de leurs pêchés tout en mettant en exergue leur position social vis-à-vis des autres paroissiens.
L’art des maîtres verriers traitant des vitraux est trop vaste et long à explorer pour ce document. Somme toute, on peut tout de même noter que les vitraux les plus célèbres colportent un mythe relatif à leurs fabrications. Ceux de la cathédrale de Chartres seraient réalisés à partir de métaux tel le fer, l’argent ou l’or et non à base de silice agrémenté de pigments. De cette technique, seuls les alchimistes en auraient les secrets. (Burensteinas P. « de la Matière à la Lumière »)